LE COMMERCE ET LES ITINERAIRES

César nous a conservé le souvenir d’un Eduen nommé Dumnorix auquel on avait affermé les péages de la Saône. On sait par ce document que ces derniers étaient en quelque sorte mis aux enchères ; personne n’ayant osé surenchérir, Dumnorix s’était fait adjuger à vil prix ces droits, source de revenus immenses. Il était capable d’entretenir une petite armée, jouissait d’une considérable influence dans le pays et briguait même le pouvoir suprême. L’existence de péages sur une artère fluviale aussi essentielle que la Saône et de modalités d’attribution d’affermage bien réglées, indiquerait une circulation intérieure intense dans la Gaule indépendante.

En Gaule, le portorium prit le nom particulier de Quadragesima Galliarum, le Quarantième des Gaules. Comme son nom l’indique, les marchandises devaient acquitter un quarantième de leur valeur, soit 2,5 %. Au regard de cet impôt, les différentes provinces du pays ne formaient qu’une seule et même circonscription douanière spéciale. Quelques stations de péage sont connues en périphérie à Metz sur la Moselle, Arles sur le Rhône, Genève, mais aussi à l’intérieur dans quelques ports fluviaux comme Lyon où cette administration avait son siège central. Les nombreux plombs de douane qu’on y a découverts dans la Saône se rapportent justement à un bureau du portorium.

Principaux produits transportés par voie fluviale

Les denrées alimentaires étaient un fret habituel du commerce par eau. Il est question de transports de blé, certainement en rapport avec le service de l’annone, tantôt pour des besoins locaux, tantôt vers Rome pour nourrir la plèbe. Les armées assuraient ainsi leur propre ravitaillement par eau. César en parle très explicitement au moment de la conquête. A la poursuite des Helvètes et soucieux de ses réserves, ne pouvant compter sur les ressources locales promises par les Eduens, il avait pris soin de faire remonter par la Saône des navires chargés de blé. Le trafic de céréales se révèle aussi actif en temps de paix…

Ce commerce céréalier semble plus important encore dans la vallée rhodanienne si l’on en croit Sidoine Apollinaire qui parlait des horrea de la Saône et du Rhône remplis de blé. Ce fret était si ordinaire que les marchands de blé avaient tout intérêt à devenir armateurs, à moins que ce ne soit l’inverse. Un certain Toutius Incitatus, dont l’épitaphe a été découverte à Lyon, était à la fois naute de la Saône et negotiator frumentarius.